Installations sanitaires et hygiène personnelle

Éléments clés

Des installations sanitaires en bon état, propres, suffisantes et faciles d’accès sont essentielles pour garantir l’hygiène et la dignité des personnes détenues, ainsi qu’éviter la transmission de certaines maladies infectieuses. Le fait de ne pas pourvoir aux besoins sanitaires des détenu·e·s peut constituer un traitement cruel, inhumain ou dégradant, voire de la torture. 

Les toilettes ou latrines devraient être accessibles directement de la cellule ou du dortoir, et séparées par une porte ou une cloison. Dans tous les cas, les personnes détenues doivent pouvoir satisfaire aux besoins naturels au moment voulu et dans le respect de leur dignité.

Les douches doivent être suffisantes pour que les personnes détenues puissent les utiliser aussi fréquemment que nécessaire, de préférence quotidiennement (au minimum une fois par semaine sous un climat tempéré) et conformément aux principes généraux d’hygiène. Les douches communes peuvent représenter un espace de risque pour certain·e·s détenu·e·s en situation de vulnérabilité.

Les besoins spécifiques d’hygiène de certaines catégories de détenu·e·s, notamment les femmes, les enfants et les personnes handicapées, doivent être pris en considération et les aménagements nécessaires réalisés.
 

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Analyse

Les installations sanitaires - toilettes, douches et lavabos - sont des éléments du quotidien qui relèvent d’une importance vitale particulièrement dans les situations de privation de liberté, où les personnes détenues se retrouvent en situation de complète dépendance vis-à-vis des autorités. L’accès régulier à des installations propres et fonctionnelles est essentiel à la préservation de la dignité des personnes. Lorsque ces conditions ne sont pas remplies, le quotidien des détenu·e·s s’en voit fortement affecté. La non-prise en compte de ces besoins fondamentaux peut constituer un traitement cruel, inhumain ou dégradant, voire de la torture.

La propreté des installations sanitaires est essentielle non seulement pour le respect de la dignité des personnes, mais également pour prévenir la transmission de maladies infectieuses, la plupart des maladies contractées en prisons étant transmises par la voie fécale-orale. Le manque d’eau et un accès insuffisant aux douches affectent également l’hygiène personnelle et augmente le risque de contracter des maladies.

L’état de la tuyauterie, des systèmes d’évacuation et des installations sanitaires en général est important pour garantir la bonne hygiène de l’établissement et pour prévenir les pertes d’eau. Le manque d’eau peut résulter de robinets ou de tuyaux endommagés, de pression insuffisante, ou de sécheresse. Il est essentiel que dès la conception des lieux de détention, les éléments d’ordre climatique (y compris les changements saisonniers), l’accès au système d’évacuation et les besoins en fonction de la capacité prévue soient dûment pris en compte.

L’eau disponible doit pouvoir être répartie rationnellement entre les toilettes, les lavabos et les douches pour pouvoir garantir l’hygiène personnelle de détenu-e-s, mais entre la cuisine, l’infirmerie, le traitement des déchets, l’arrosage (notamment pour les potagers le cas échéant), et pour les besoins des personnels travaillant dans l’établissement. Dans les cas où les quartiers d’habitation des surveillant·e·s sont attenants au lieu de détention, leurs besoins en eau et leurs garanties d’hygiène doivent évidemment être pris en compte également.

Selon les standards minimaux établis par le CICR, la quantité d’eau nécessaire à la survie est de 3-5 litres par personne et par jour, et de 10-15 litres par personne et par jour pour couvrir tous besoins minimaux et rester en bonne santé, du moment que les autres services et installations sont également fonctionnels (CICR et OMS).

Toilettes et latrines

Différents types de toilettes ou latrines peuvent exister en prison, mais ils sont généralement de deux types selon les contextes: latrines sèches, si possible équipées d’un système de ventilation, ou toilettes avec chasse d’eau permettant l’évacuation des excréments. Le choix d’un système ou d’un autre dépend de facteurs économiques, climatiques et parfois culturels, mais le système de latrines sèches permet difficilement de garantir un minimum satisfaisant d’hygiène, surtout si l’établissement est de grande taille. Le système d’évacuation des déchets et des excréments doit être efficace et permettre de prévenir la transmission de maladies infectieuses. De la même manière, les fosses sceptiques doivent être fonctionnelles et de dimensions proportionnelles à la capacité du lieu de détention.

Quel que soit le système utilisé, il est essentiel que l’accès soit aisé et rapide, afin de pouvoir se satisfaire aux besoins naturels au moment voulu, et que les installations soient propres, pour préserver la dignité des personnes et prévenir la transmission de maladies infectieuses. Dans certaines prisons, les cours de promenade sont équipées d’urinoirs collectifs, qui doivent également respecter les standards minimaux d’hygiène.

Tous les établissements ne garantissent pas l’existence de toilettes à l’intérieur même de la cellule ou du dortoir, même si c’est le meilleur moyen de garantir que les personnes y aient un accès au moment voulu.

Lorsque les cellules ou dortoirs ne sont pas pourvus de toilettes ou de latrines, un système doit être mis en place pour leur permettre d’y accéder rapidement de jour comme de nuit.

Il arrive qu’en l’absence de toilette dans la cellule ou le dortoir, des seaux soient utilisés, notamment la nuit. Une telle pratique ne garantit que très difficilement les exigences en matière d’intimité et d’hygiène, même si les seaux sont vidés régulièrement, et cette pratique devrait être évitée (CPT).

Les installations sanitaires figurent parmi les éléments infrastructurels les plus sollicités, il est donc normal qu’elles s’usent rapidement, également parce qu’elles risquent d’être endommagées voire vandalisées. Il est donc nécessaire que les autorités disposent d’un matériel solide, facile à utiliser et d’avoir à disposition un stock suffisant de matériel de rechange, notamment pour la robinetterie. En cas de matériels défectueux, les risques de pertes et de fuites d’eau peuvent être importants et menacer l’approvisionnement nécessaire en cas de pénurie ou manque d’eau.

Le nombre de latrines disponibles devrait d'une pour 25 par détenu·e·s (OMS), le strict minimum acceptable étant une latrine pour 50 détenu·e·s (CICR). Les situations de surpopulation représentent une surcharge sur la capacité des installations sanitaires et posent des risques sérieux en termes d’hygiène, de prévention des maladies, et de respect de l’intimité et de la vie privée des personnes détenues.

Lorsque les toilettes sont intégrées aux cellules ou aux dortoirs, il est important qu’elles soient séparées par une cloison et par une porte, afin de préserver la dignité des personnes détenues, notamment en cellules collectives, et de préserver l’hygiène de l’espace de vie. Une annexe sanitaire qui n’est que partiellement cloisonnée n’est pas acceptable dans une cellule occupée par plus d’un·e détenu·e (CPT). Enfin, il doit y avoir un espace suffisant entre les toilettes et les lits des détenu·e·s.

Les toilettes doivent être suffisamment ventilées pour éviter les mauvaises odeurs en cellules/dortoirs. Les bouches d’aération trop bruyantes risquent d’être obstruées par les détenu·e·s et perdre ainsi toute efficacité.

Dans les cas où la prison est équipée d’un système de vidéo-surveillance, les toilettes ne devraient pas être dans le champ vision, ou doivent pour le moins floutées.

Toute toilette, qu’elle soit individuelle ou collective, doit être équipée d’un robinet.
La quantité d’eau nécessaire pour se laver les mains après avoir utilisé les toilettes, et ainsi prévenir la transmission de maladies infectieuses, doit être au minimum d’un litre par personne et par jour (CICR). Toutes les toilettes devraient être nettoyées quotidiennement et désinfectées une fois par semaine, et jusqu’à deux fois par jour en cas d’épidémie (CICR). Les détenu-e-s doivent avoir à disposition du papier hygiénique en quantité suffisante, ou un accès à l’eau suffisant en fonction du contexte et des considérations culturelles.

Les cellules d’isolement et les cellules disciplinaires doivent être équipées de toilette et d’un point d’eau, ou au minimum il doit être possible de satisfaire aux besoins naturels au moment voulu, en suivant les standards en vigueur pour les autres cellules et dortoirs. Il en va de même pour l’accès aux douches. Les mesures disciplinaires ne doivent pas porter atteinte à la dignité de la personne.

Douches

Tout comme pour les toilettes et latrines, les douches doivent être en nombre suffisant, en bon état et propres, et les détenu·e·s doivent pouvoir les utiliser aussi fréquemment que possible, au minimum une fois par semaine, en prenant en compte le climat et les préceptes généraux d’hygiène. L’eau chaude doit être disponible en quantité suffisante et la température de l’eau doit pouvoir être modulée en fonction des saisons et du climat.

Il est important que toutes les personnes détenues aient accès à la douche sur un pied d’égalité et pour une durée de temps égale. Les autorités doivent s’assurer que les détenu·e·s les plus vulnérables, les plus faibles ou stigmatisé·e·s pour une raison ou pour une autre ne soient pas discriminé·e·s dans l’accès aux douches, ou qu’ils n’y aient accès que lorsqu’il n’y a plus de chaude. Dans les cas où la quantité d’eau est limitée et/ou que la rotation dans l’accès aux douches implique la présence d’escortes, il peut être important de limiter la durée des douches, voire le débit d’eau. Au minimum, ce dernier devrait être de 2,5 litres par minute. 5 litres par personne représentent le minimum d’eau nécessaire pour se laver. Enfin, il devrait y avoir au minimum une douche pour 50 détenu·e·s (CICR). 

L’architecture des douches partagées devrait garantir un minimum d’intimité aux détenu·e·s, et les douches devraient être séparées les unes des autres par des cloisons. La configuration doit également permettre de déposer ses vêtements au sec, sur un banc ou une patère. En tant qu’espace commun généralement peu surveillé, les douches peuvent représenter des risques de violence, d’abus, voire de viols, pour les détenu·e·s les plus vulnérables. Il est important que des mesures préventives soient prise pour réduire au maximum ce type de risques.

Hygiène personnelle

Les personnes détenues sont responsables de leur hygiène personnelle, ainsi que de l’entretien et de la propreté de leurs vêtements et de leur logement. Pour ce faire, elles doivent avoir à disposition les articles de toilette nécessaires et en quantité suffisante, ainsi que des ustensiles de ménage et produits d’entretien. Si l’hygiène personnelle est essentielle pour garantir la vie en communauté en contexte de privation de liberté et pour éviter l’apparition de maladies, notamment de la peau, elle est également une constituante essentielle de la dignité de la personne. Le fait de ne pas pourvoir aux besoins essentiels en termes d’hygiène personnelle peut constituer une forme de traitement cruel, inhumain ou dégradant.

La propreté des installations communes doit être garantie par les autorités, qui doivent notamment lutter efficacement contre la présence de blattes, rongeurs, puces, punaises de lit, poux et vermine général. Pour ce faire, l’établissement doit être désinfecté régulièrement, fumigé le cas échéant et des contrôles réguliers doivent avoir lieu dans les cellules, dortoirs, toilettes et douches. Ces contrôles sont indispensables pour prévenir les maladies, notamment les maladies de la peau.

Au minimum, les détenu·e·s doivent recevoir régulièrement de la part des autorités du savon (au minimum 100-150 grammes par mois selon le CICR), du dentifrice, du papier hygiénique (s’il est d’usage) et des produits d’entretien (si ce dernier n’est pas effectué par l’établissement). Les détenu·e·s doivent également recevoir de quoi entretenir leur chevelure, et les hommes doivent pouvoir se raser régulièrement. Les personnes détenues ne doivent dépendre pas de leurs proches pour ces biens élémentaires ou être contraint·e·s de les acheter à l’intérieur de la prison.

Femmes
Groupes en situations de vulnérabilité

Les autorités ont la responsabilité de répondre adéquatement aux besoins des femmes et des filles mineures détenues, notamment pour ce qui concerne leurs menstruations. Elles doivent ainsi recevoir gratuitement et de manière régulière des serviettes hygiéniques et des produits de toilette de base. Les femmes avec des enfants en bas âge doivent recevoir des couches de manière régulière et gratuitement. L’absence de tels produits de base peut s’apparenter, en soi, à un traitement dégradant. Un accès aisé à des installations sanitaires propres et en bon état doit leur être garanti. 

Enfants

Les enfants détenus doivent recevoir gratuitement des articles de toilette de base et avoir un accès régulier à des installations sanitaires propres et en bon état. L’hygiène personnelle doit être encouragée et les moyens nécessaires doivent être mis à disposition par les autorités.

Personnes handicapées

Les personnes handicapées doivent avoir un accès facilité aux toilettes et aux douches. Si nécessaire, des aménagements raisonnables doivent être effectués par les autorités. Les dimensions des cellules spéciales doivent permettre que le déplacement en fauteuil roulant jusqu’au WC soit possible sans pour autant le priver de porte. Lorsque les personnes détenues avec un handicap ne peuvent pas prendre soin de leur hygiène personnelle, elles doivent recevoir le soutien nécessaire de la part du personnelle. Cette aide ne doit pas reposer sur la bonne volonté de codétenu·e·s. 

Personnes LGBTI

Les personnes LGBTI privées de liberté peuvent être exposées au risque de ne pas avoir accès aux douches sur une base discriminatoire. Les autorités doivent garantir un accès équitable à l’ensemble de la population détenue. Elles doivent également s’assurer que les personnes LGBTI ne sont pas victimes d’abus lorsqu’elles se rendent dans les douches collectives. Les besoins spécifiques d’hygiène des détenu·e·s transgenres doivent être pris dûment en considération par les autorités. 

Minorités et peuples autochtones

Les normes d’hygiène sont parfois liées à des éléments cultures voire à des pratiques religieuses. Il est important que les minorités ethniques, religieuses ou autochtones puissent suivre, dans la mesure du possible, les règles et coutumes qui leur sont propres. Pour ce faire, les autorités peuvent par exemple envisager un accès facilité à des points d’eaux à certaines heures pour les détenu·e·s qui en expriment le besoin. 

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Questions pour le monitoring

Quel est le ratio de toilettes et de douches par détenu·e ?

Lorsque les toilettes sont intégrées aux cellules/dortoirs, sont-elles séparées par une porte et/ou une cloison ?

Comment l’accès aux toilettes est-il garanti dans les cellules ou dortoirs qui n’en sont pas pourvus ?

Les cellules et dortoirs sans toilettes sont-elles pourvues de seaux ? Le cas échéant, à quelle fréquence sont-ils changés et nettoyés ?

Quel est l’état général de propreté et d’entretien des installations sanitaires ? qui est en charge du nettoyage ? Des produits d’entretien sont-ils fournis aux détenu·e·s ?

Les installations sanitaires sont-elles désinfectées régulièrement ?

Quelle est la quantité d’eau quotidienne disponible par détenu·e par jour ?

Existe-t-il un système de ventilation dans les toilettes et dans les douches ? Le cas échéant, est-il fonctionnel ? 

L’eau chaude est-elle fournie en quantité suffisante dans les douches ? 

Les personnes en régime d’isolement ont-elles un accès régulier aux douches et toilettes ? 

L’architecture des douches permet-elle un minimum d’intimité pour les détenu·e·s ?

Femmes
Personnes étrangères
Personnes handicapées
Minorités et peuples autochtones
Enfants
Personnes LGBTI

Y a-t-il des indications selon lesquelles l’accès aux douches n’est pas équitable pour toute la population détenue ? Certains groupes sont-ils discriminés ?

Femmes
Enfants

Les femmes et les filles mineures reçoivent-elles régulièrement, en quantité suffisante et gratuitement les produits hygiéniques dont elles ont besoin, y compris des serviettes hygiéniques ? 

Enfants

Les enfants détenus reçoivent-ils les produits nécessaires à leur hygiène ? Une bonne hygiène est-elle encouragée par les autorités par le biais de sensibilisations ?

Personnes handicapées

Des aménagements sont-ils prévus pour que les personnes handicapées aient un accès facilité aux toilettes et aux douches ? Reçoivent-elles l’aide nécessaire de la part du personnel pour garantir un nouveau d’hygiène décent ?

Des aménagements sont-ils prévus pour les détenu·e·s ayant des besoins spécifiques d’hygiène et d’accès aux points d’eau du fait de leur culture ou de leur religion ? 

Personnes LGBTI

Y a-t-il des indications que les personnes LGBTI sont discriminées dans l’accès aux douches, ou qu’elles sont victimes d’abus dans les douches collectives ?

Personnes LGBTI

Les personnes transgenres ont-elles accès à des produits d’hygiène spécifique ?

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