Moyens de contrainte

Éléments clés

Les moyens de contrainte sont des instruments destinés à restreindre ou limiter temporairement la liberté de mouvement d’une personne sans la blesser : par exemple les menottes, les lanières, les camisoles,ou  les lits de contention.

L’utilisation de moyens de contrainte doit être interdite sauf dans des situations bien précises et strictement réglementées. Ainsi, de tels instruments  ne doivent pas être utilisés plus longtemps que ce qui est strictement nécessaire et uniquement afin de prévenir les risques d’évasion lors des transferts, les atteintes à l’intégrité physique de tiers, les actes d’automutilation et les dégâts causés aux infrastructures.

En aucun cas les moyens de contrainte ne doivent être utilisés à des fins de sanctions disciplinaires. Certains instruments de contrainte tels que les chaînes et les fers sont proscrits.

Le recours à des instruments de contrainte à l’égard de certaines catégories de personnes détenues, notamment les femmes enceintes et les mineur·e·s doit faire l’objet d’un encadrement encore plus strict.
 

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Analyse

irconstances pouvant exceptionnellement justifier le recours à des instruments de contrainte

Les instruments de contrainte permettent de restreindre ou d’empêcher la liberté de mouvement d’une personne. Les autorités pénitentiaires peuvent y recourir uniquement pour une durée limitée dans des situations spécifiques, clairement identifiées et reconnues par la loi.

En aucun cas les moyens de contrainte ne doivent être utilisés en tant que sanctions disciplinaires.

Les moyens de contrainte peuvent être utilisés dans deux situations principales :

  • pour prévenir les risques d’évasion lors des transferts des détenu·e·s. Dans ce type de situation (audience judiciaire, hospitalisation, changement d’établissement et extraction d’un-e détenu-e en vue de son renvoi vers un pays tiers) les moyens de contrainte les moins incapacitants (menottes, lanières, ceintures) doivent être utilisés.
  • pour prévenir des atteintes à l’intégrité physique d’autres détenu·e·s ou de membres du personnel ou à la sécurité des bâtiments, ou pour prévenir des actes d’auto-mutilation. Dans ces situations, les autorités peuvent être amenées à recourir à des moyens de contrainte plus incapacitants (camisoles, lits de contention, sédation médicamenteuse).

Quelle que soit la situation, l’utilisation des moyens de contrainte physique doit être faite en dernier recours, de manière exceptionnelle et pour une durée limitée. D’autre part, plus la technique utilisée est incapacitante, plus les garanties encadrant les raisons et les modalités de son utilisation doivent être renforcées.
 

Respect des principes de légalité, nécessité et proportionnalité

Le principe de légalité exige que le recours aux instruments de contrainte soit inscrit dans la loi.
La loi doit préciser quels instruments peuvent être utilisés et dans quelle(s) circonstance(s). Elle doit également encadrer les conditions  d’utilisation de ces instruments, y compris la durée.

Le principe de nécessité vise à assurer que les instruments de contrainte ne sont effectivement utilisés qu’en dernier recours lorsque tous les autres moyens de maintien de l’ordre et de la sécurité ont été utilisés en vain. La durée d’utilisation de tel ou tel instrument doit être appréciée à la lumière de ce principe. Ainsi, tout recours à un instrument de contrainte doit être ré-évalué de manière régulière et prendre fin dès  que les raisons ayant conduit à leur utilisation ne sont plus présentes.

Le principe de proportionnalité s’applique pour garantir que le moyen de contrainte utilisé est approprié au regard du risque considéré et que le moyen le moins incapacitant est préféré.
Le principe de proportionnalité vise aussi à garantir que la durée d’utilisation des moyens de contrainte répond au risque identifié. Concrètement, le personnel médical de l’établissement doit vérifier à intervalles réguliers que ces instruments n’ont pas d’effets négatifs sur la santé physique et psychologique de la personne concernée.

Les instruments de contrainte physiques

On peut distinguer deux types d’instruments de contrainte principaux:

1) les instruments les moins entravant qui n’empêchent pas les personnes de se déplacer, comme les menottes (placées sur les poignets, les chevilles ou les jambes), les ceintures, les lanières ou encore les camisoles.

2)  les instruments de contraintes dits « aux quatre extrémités » ou plus qui servent à attacher les quatres membres de la personne. Il s’agit par exemple des lits ou des planches de contention qui immobilisent complètement la personne. Le recours à de tels instruments requiert obligatoirement l’intervention d’un médecin et doit faire l’objet d’un contrôle plus étroit au vu des conséquences physiques et psychologiques de leur utilisation.

Certains instruments de contrainte physiques tels que les chaînes et les fers sont totalement proscrits. De même, les autorités détentrices ne doivent pas utiliser d’armes à impulsion électrique comme instrument de contrainte.

La contention chimique

L’utilisation de moyens de contention chimique doit être évitée. Lorsque la sédation est utilisée en tant que contention chimique, elle doit être strictement encadrée et limitée uniquement à la prévention d’actes de violence à l’encontre d’autrui ou d’automutilation. Une telle utilisation doit être décidée en accord avec un médecin. Toute administration de sédatifs doit être réalisée par un médecin ou un personnel médical autorisé.

En aucun cas le recours à ces procédés de sédation médicamenteuse ne doit se substituer à une démarche thérapeutique.

Risques liés à un usage abusif ou arbitraire des moyens de contrainte

Le cadre juridique impose clairement un recours aux moyens de contrainte strictement encadré par les principes de nécessité et de proportionnalité. Les moyens de contrainte ne doivent donc jamais être utilisés de manière systématique, arbitraire et/ou discriminatoire.

Lorsque l’utilisation est systématique, comme dans le cas où des personnes sont automatiquement menottées durant un transfert sans qu’une évaluation individualisée de la nécessité d’une telle mesure ne soit effectuée, la pratique peut être considérée comme abusive.

L’utilisation est arbitraire lorsque les autorités, mettent en avant la dangerosité alléguée ou le régime de détention de  certain·e·s détenu·e·s  et les entravent lors de leur transfert, alors qu’aucune évaluation individuelle du risque d’évasion n’a été menée.

L’utilisation de moyens de contrainte peut se révéler discriminatoire lorsqu’elle affecte certains groupes spécifiques indépendamment de leur dangerosité alléguée ou de leur régime de détention.
 
Le caractère abusif du recours à des instruments de contrainte peut également être lié à la manière dont ils sont utilisés, qui peut dissimuler une volonté de sanction de la part des autorités. Par exemple, même si le recours à des menottes est justifié par la situation, elles peuvent être intentionnellement serrées de manière excessive.

Femmes
Personnes étrangères
Personnes handicapées
Minorités et peuples autochtones
Enfants
Personnes LGBTI

L’utilisation de moyens de contrainte peut se révéler discriminatoire lorsqu’elle affecte certains groupes spécifiques indépendamment de leur dangerosité alléguée ou de leur régime de détention.

Risques de souffrances physiques et psychologiques

L’utilisation d’instruments  de contrainte peut engendrer des traumatismes physiques et psychologiques pour les personnes qui y sont soumises, même lorsque les moyens les moins entravant sont utilisés. De telles pratiques peuvent ainsi constituer une atteinte à l’intégrité physique et mentale des personnes concernées. Par exemple, le recours à des menottes peut se révéler douloureux et occasioner des blessures aux poignets s’il est prolongé ou si les menottes sont trop serrées.

Attacher et plaquer une personne sur le dos au sol peut entraîner des risques vitaux, notamment par asphyxie posturale.

Le recours à des instruments de contrainte peut également engendrer des souffrances et des humiliations, notamment lorsqu’il est accompagné d’une exposition publique.

Femmes

Les femmes enceintes ne devraient également pas être soumises à des moyens de contrainte. Y recourir (menottes comprises) est totalement prohibé lors du travail, de l’accouchement et des moments qui suivent immédiatement l’accouchement.

Enfants

Le risque d’humiliation et de stigmatisation est particulièrement élevé pour les détenu·e·s mineur·e·s. Les autorités qui de manière exceptionnelle utiliseraient ces instruments à l’encontre de détenu·e·s mineur·e·s doivent y porter une attention particulière et éviter toute forme d’exposition publique. 

Rôle du médecin

Le médecin a un rôle particulièrement important à jouer pour contrôler les instruments de contrainte utilisés ainsi que leurs effets physiques et psychologiques. De manière générale, plus le moyen utilisé est incapacitant, plus la personne qui y est soumise se trouve dans une situation de vulnérablité physique et psychologique, et plus le rôle du médecin est primordial.

Le contrôle médical est  nécessaire en cas d’utilisation prolongée du moyen de contrainte et le médecin doit avoir le pouvoir de demander la suspension immédiate de la mesure.

Lorsque des instruments « à quatre extrémités ou plus » sont utilisés, un médecin doit valider la décision et être associé à leur pose pour éviter tout effet délétère sur l’intégrité physique des personnes.

Seul un médecin peut prendre la décision d’administrer des sédatifs ou autres moyens de contention chimique.

Quel que soit l’instrument de contrainte utilisé, un médecin doit être impliqué lorsqu’il est appliqué à des femmes enceintes, à des détenu·e·s handicapé·e·s ou présentant des troubles mentaux ou à des détenu·e·s mineur·e·s.

Lorsque les instruments de contrainte ont été retirés, les personnes qui y ont été soumises doivent pouvoir avoir accès à un médecin qui évaluera les éventuelles séquelles et traitements qui devraient être dispensés.
 

Femmes
Personnes handicapées
Enfants

Quel que soit l’instrument de contrainte utilisé, un médecin doit être impliqué lorsqu’il est appliqué à des femmes enceintes, à des détenu·e·s handicapé·e·s ou présentant des troubles mentaux ou à des détenu·e·s mineur·e·s.

Contrôle hiérarchique et procédures de plainte

Le recours à des moyens de contrainte doit toujours être soumis au contrôle hiérarchique. Cependant, plus le moyen utilisé est incapacitant et suceptible de générer des souffrances physiques et psychologiques et plus le contrôle interne doit être étroit pour en apprécier la légalité et limiter les effets néfastes.

Lorsqu’une autorisation préalable n’est pas possible, notamment en cas d’actes de violence envers autrui, d’automutilation, ou de tentative d’évasion, le recours à ces moyens doit être consigné a posteriori dans un registre qui doit préciser le nom de la personne concernée, les agents impliqués, la ou les méthode(s) utilisée(s) et la durée de l’utilisation.

Les personnes détenues qui considèrent avoir été soumises de manière arbitraire à de tels moyens de contrainte ou qui affirment souffrir de séquelles physiques et/ou psychologiques doivent avoir accès à des procédures de plainte administrative et/ou judiciaire.

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Questions pour le monitoring

Les conditions et modalités de recours à des moyens de contrainte sont-elles inscrites dans la loi ?

Quelles sont les situations prévues par la loi qui permettent le recours aux moyens de contrainte ?

Dans la pratique, comment les moyens de contrainte sont-ils effectivement utilisés ?

Quelle est la procédure interne concernant l’utilisation des moyens de contrainte ?

Un médecin est-il associé à la procédure de contrôle des moyens de contrainte utilisés ?

Femmes
Personnes étrangères
Personnes handicapées
Minorités et peuples autochtones
Enfants
Personnes LGBTI

Des instruments de contrainte sont-ils utilisés de manière discriminatoire à l’encontre de certains groupes de personnes détenues ? 

Une procédure interne permet-elle d’évaluer régulièrement la proportionnalité des moyens de contrainte utilisés ?

Quels sont les moyens de contrainte physique utilisés par les autorités ?

Les personnels sont-ils formés, de manière pratique et théorique, aux conditions de recours à des moyens de contrainte ?

La sédation médicamenteuse est-elle utilisée comme une forme de contrainte chimique ? Le cas échéant, un médecin est-il systématiquement impliqué ?

Un médecin est-il systématiquement consulté en cas de recours à des instruments de contrainte à quatre extrémités ou plus ?

Enfants

Des moyens de contrainte sont-ils utilisés sur des détenu·e·s mineur·e·s ?

Femmes

Des  moyens de contrainte sont-ils utilisés sur des femmes enceintes ?

Personnes handicapées

Un médecin est-il systématiquement consulté lors de l’utilisation de moyens de contrainte à l’égard de détenu·e·s handicapé·e·s?

Le recours aux moyens de contrainte est-il consigné dans un registre ?

Toute allégation d’usage abusif des moyens de contrainte donne-t-elle lieu à des procédures d’enquêtes administratives et/ou judiciaires ?

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